Le procès du journaliste Soulaimane Raissouni a été reporté au jeudi 10 juin prochain suite à une demande de sa défense d’ »un délai pour s’entretenir avec son client ».
La Chambre criminelle de la Cour d’appel de Casablanca a décidé de reporter le procès du journaliste Soulaimane Raissouni au jeudi 10 juin en acquiesçant à la demande de la défense du journaliste d’un report du dossier afin de pouvoir s’entretenir amplement avec son client.
Le juge Bouchaib Farih a donné son consentement après avoir refusé catégoriquement le report au vu de l’état de santé de M. Raissouni qui est à son 57e de grève de la faim.
Afin de conforter le refus, le représentant du parquet a présenté un rapport de la DGAPR qui prétend que « Raissouni est en bonne santé ».
Cinq avocats se sont succédé à la barre du tribunal pour demander le report du procès sur la base de la détérioration sans précédent de l’état de santé de Soulaimane Raissouni.
« Nous réclamons le report du procès au vu de l’état de santé de Soulaimane qui ne lui permet pas de suivre le déroulé du procès…», disait l’avocat de la défense Me Mohamed Messaoudi avant que le juge ne l’interrompe : « C’est son choix ».
« Le tribunal ne peut pas rester tributaire d’un choix de l’accusé », a-t-il soutenu en ajoutant « la situation de grève de la faim n’est pas une situation à même de permettre le report. Nous vous avons donné 4 mois pour préparer la défense ».
Cette réaction du juge n’a pas manqué de sortir de ses gonds un bâtonnier aussi calme et courtois que M. Abderrahmane Benameur qui s’est insurgé « la loi donne le droit au report ».
Bouchaib Farih intransigeant
« Le tribunal a statué sur ses demandes et considère que le dossier est prêt. Est-ce qu’on va rester dépendant d’un choix personnel », a répliqué le juge.
« Qu’il choisisse ou pas, sa situation ne permet pas de continuer », a répondu sur un ton ferme Benameur avant que Me Messaoudi ne prenne le relais.
« C’est impossible pour nous de plaider pour une personne qui peine à se tenir debout, qui n’arrive pas à tenir la tête levée et qui risque, de l’avis de ses médecins, un arrêt cardiaque à n’importe quel moment », a étayé Me Messaoudi.
Considérant que la grève de la faim a été dictée par l’arrestation et la détention abusives et face à l’entêtement du juge Farih, Me Souad Brahma a demandé « un délai pour que la défense puisse s’entretenir avec son client ».
Pour sa part, un des avocats de la « victime » est intervenu pour conforter les demandes de la défense de Raissouni. « Si l’accusé veut un report étant donné que son état de santé ne lui permet pas de suivre les plaidoiries, nous ne pouvons qu’accepter à condition qu’il (l’accusé NDLR) se prépare psychologiquement pour la prochaine audience ».
« Soulaimane Raissouni, nous allons vous donner une semaine pour vous entretenir avec votre défense bien que nous considérons que le dossier est prêt », a affirmé le Juge.
« La semaine prochaine, vous pouvez venir assister et aller vous reposer là-bas (le juge fait référence à la cage en verre de la salle 7 de la Cour d’appel NDLR) ou suivre à distance le procès », a dit le juge à l’adresse de M. Raissouni.
Notons que pendant cette audience, Soulaimane Raissouni qui a un pied quasi paralysé ne pouvait même pas se tenir droit dans sa chaise. Il n’a pas cessé de supporter sa tête avec sa main sans pour autant pouvoir la garder relevée.
En parallèle avec le procès du journaliste
Parallèlement avec le procès de Soulaimane Raissouni, un sit-in de solidarité a été organisé par ses soutiens devant la Cour d’appel. Y ont pris part des militants d’Attac Maroc et l’AMDH (Association marocaine des droits humains) ainsi que plusieurs militants de gauche.
Rappelons que la chambre criminelle de première instance de la Cour d’appel de Casablanca a rejeté, mardi, la demande de défense de Raissouni de lui accorder une mise en liberté provisoire.
Soulaimane Raissouni est à son 57e jour de grève de la faim, un mouvement qu’il s’obstine à poursuivre malgré les différentes sollicitations l’implorant à s’arrêter et malgré qu’il a perdu plus de 30 kg.
Raissouni réclame « un procès équitable, sa poursuite en état de liberté provisoire et la mise d’un terme à sa détention arbitraire ».
Il est poursuivi, faut-il le rappeler, pour « attentat à la pudeur avec violence » et « séquestration », suite à une plainte déposée par un militant LGBT. Ce dernier avait publié –avec une fausse identité– un poste Facebook qui porte sur des faits remontant à 2018. Repéré par la cellule de veille du ministère public, ce poste Facebook a servi de base pour une autosaisine du parquet général. Convoqué par la police « Mohammad Adam » a porté plainte contre l’éditorialiste d’Akhbar Al Yaoum.