Malgré une légère amélioration (+1.06) de son score global, le Maroc a perdu 3 places dans le classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières (RSF) en passant de la 133e place à la 136e.
L’exercice du journalisme, « principal vaccin » contre la désinformation en pleine pandémie, est « totalement ou partiellement bloqué » dans plus de 130 pays, alerte Reporters sans frontières (RSF), qui publie mardi l’édition 2021 de son classement mondial de la liberté de la presse.
Au total, 73% des 180 pays évalués par l’ONG se caractérisent par des situations jugées « très graves », « difficiles », ou « problématiques » pour les journalistes, et sont ainsi classés noir, rouge ou orange sur la carte du monde de la liberté de la presse.
Le Maroc ne fait pas exception. RSF a considéré, dans son classement annuel, que les journalistes marocains sont « sous pression judiciaire ».
« Au Maroc, les pressions judiciaires contre les professionnels de l’information persistent », a alerté l’ONG. «Outre les procès qui se poursuivent depuis des années contre plusieurs acteurs des médias, de nouvelles actions en justice ont été intentées contre les journalistes, les impliquant dans des affaires de mœurs», a soutenu RSF.
Instrumentalisation de la parole des femmes
Du point de vue des rédacteurs du rapport, «l’instrumentalisation de la parole des femmes dans ces affaires judiciaires est récurrente».
«Le déroulement des procès, la surmédiatisation et la diffamation qui accompagnent ces procès privent la victime et l’agresseur présumé de quelques-uns de leurs droits. De lourdes condamnations ont été prononcées, et plusieurs journalistes et citoyens-journalistes restent incarcérés », ont-ils ajouté.
A noter que RSF suit de près les affaires Soulaimane Raissouni, Omar Radi et Maâti Monjib. Dans un article titré « Maroc : la grève de la faim, l’ultime recours des journalistes confrontés à une justice arbitraire », l’ONG a appelé «les autorités à mettre un terme aux procédures arbitraires et abusives qui poussent les journalistes à mettre leur vie en danger».
Rappelons qu’Omar Radi et Soulaimane Raissouni, détenus provisoirement depuis des mois, deux journalistes marocains, observent actuellement une grève de la faim pour demander leur poursuite en état de liberté et pour réclamer un procès équitable.
La liberté de la presse mise à mal par la pandémie
Par ailleurs, d’après le présent classement 73% des 180 pays évalués par l’ONG se caractérisent par des situations jugées « très graves », « difficiles », ou « problématiques » pour la profession.
Si cette part de territoires peints en noir, rouge ou orange sur la carte du monde reste stable sur un an, seuls 12 pays sur 180, soit 7%, contre 8% en 2020, affichent une « bonne situation ». Une « zone blanche » qui n’a « jamais » été « aussi réduite depuis 2013 », d’après RSF.
En outre, la pandémie de Covid-19 a représenté « une forme d’opportunité pour des Etats qui on pu restreindre la liberté de la presse », souligne à l’AFP le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire.
Elle a ainsi exacerbé la répression dans les pays les plus muselés comme l’Arabie Saoudite (170e) ou la Syrie (173e, +1), d’après l’ONG.
La pandémie a également « provoqué une énorme fermeture des accès » au terrain et aux sources pour les journalistes, « pour une part légitime, quand il s’est agi de précautions sanitaires, mais aussi illégitime. Dans les deux cas, la question, c’est: ces accès seront-ils rouverts ? », s’alarme Christophe Deloire.
La situation est d’autant plus préoccupante que le journalisme est le principal rempart contre la « viralité de la désinformation par-delà les frontières, sur les plateformes numériques et les réseaux sociaux », parfois alimentée par le pouvoir.