Fermée au lendemain l’assassinat du professeur Samuel Paty, la mosquée de Pantin (près de Paris) est au centre d’un bras de fer entre l’Etat français et les citoyens musulmans qui réclament sa réouverture avant Ramadan (mi-avril).
Après l’avoir fermée dans la foulée de l’assassinat du professeur Samuel Paty, décapité dans un attentat terroriste, les autorités françaises conditionne la réouverture de la mosquée de Pantin par le départ du recteur et de l’imam.
En proche banlieue parisienne, la mosquée de Pantin compte environ 1.300 fidèles. Elle a été fermée pour six mois le 21 octobre par le préfet, sur instruction du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
En cause, le relais sur la page Facebook de la mosquée de la vidéo d’un père d’élève, qui avait été à l’origine de l’engrenage ayant conduit à l’assassinat de Samuel Paty, et la présence d’un imam formé au Yémen et accusé par les autorités d’être « impliqué dans la mouvance islamiste ».
La mosquée de Pantin fermée pour six mois
Depuis cette sanction, l’Etat conditionne toute réouverture anticipée de la mosquée, avant le début du ramadan (mi-avril), aux départs de M’hammed Henniche et de l’imam Ibrahim Doucouré, pourtant déjà écarté.
M. Henniche, qui a toujours nié les penchants islamistes que lui prêtent le gouvernement, s’y est jusque-là refusé. « On veut faire un exemple de cette mosquée », a-t-il regretté auprès de l’AFP.
Musulman conservateur de 50 ans, cet entrepreneur de profession fut pendant une vingtaine d’années un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics, du maire de Pantin jusqu’à Nicolas Sarkozy, lorsque ce dernier était président de la République.
Pour compliquer la situation, le préfet a également retiré en novembre à l’association qui gère la mosquée son caractère cultuel, au motif que ses activités avaient « porté atteinte à l’ordre public », selon un courrier consulté par l’AFP.
Cette mesure a rendu caduque l’attribution par la ville de Pantin d’un bail emphytéotique pour la construction de la future grande mosquée, financée à hauteur de près de un million d’euros par des dons des fidèles.
Les habitants de Pantin déplorent le blocage
Privés de « leur » mosquée, les habitants de Pantin déplorent ce blocage, et sont contraints d’aller prier à la mosquée de la commune voisine de Drancy.
La situation « incarne une logique de bras de fer », dénonce Vincent Brengarth, l’un des avocats de la Fédération musulmane de Pantin.
« Ça prend des proportions en termes d’atteinte à la liberté associative. Ce n’est pas le rôle du ministère de l’Intérieur de décider qui doit être à la tête d’une association », soutient l’avocat.
Des responsables musulmans estiment que fermer une mosquée ne fait qu’encourager les cultes clandestins. D’autres dénoncent une immixtion dans la vie d’une association cultuelle, encadrée par la loi française.
Cette confrontation intervient alors que le gouvernement français veut renforcer le contrôle des lieux de culte via un projet de loi contre le « séparatisme » islamiste, en cours d’examen au parlement.